Le syndrome de l’imposteur
Aujourd’hui, David Pagé et moi avons fait notre immersion au CACV grâce à Steve Baird, organisateur communautaire.
Je dois avouer que mettre un pied dans un organisme communautaire à vocation sociale plutôt qu’environnementale m’a demandé une certaine dose de courage. Bien que le projet de société plus juste fasse partie des objectifs de Demain Verdun, je retardais le moment de documenter les initiatives de justice sociale par peur de ressentir ce qu’on appelle le syndrome de l’imposteur; mes priorités n’étant pas forcément celles des gens qui luttent pour combler leurs besoins de base.
Puis, je me suis mise à réfléchir et à me rappeler que rien ne devrait être pris pour acquis, que notre bonne santé financière actuelle peut basculer du jour au lendemain suite à un problème de santé mental ou physique, temporaire ou permanent et qu’une réhabilitation peut entraîner de nombreux stress. Développer ce réflexe d’empathie vers les plus démunis, comprendre leur réalité pour créer des ponts plutôt qu’ériger des murs, peuvent permettre de répondre aux objectifs de promotion de l’environnement et de justice sociale de Demain Verdun.
Le 24 septembre dernier, lors de la projection du documentaire La Terre vue du cœur de Ciné-Verdun, la réalisatrice du film disait que participer à un projet de société et développer un sentiment d’appartenance basé sur des valeurs communes de solidarité rendaient heureux. Les valeurs des personnes plus aisées financièrement ne sont pas forcément incompatibles avec celles des plus démunis, ce qui m’amène à poser la question suivante : pourquoi ne pas oser envisager la gentrification de Verdun sous un angle « plus constructif » ?
C’est donc dans cette optique que j’ai sollicité un entretient avec Steve, soit créer des ponts entre les différents groupes populationnels qui habitent Verdun afin d’unir nos forces face aux enjeux environnementaux qui nous touchent tous.
Qu’est-ce que le CACV ?
Si on visite le site internet de l’organisme (http://cacv-verdun.org/presentation/), on y retrouve la définition suivante : « Le Comité d’action des citoyennes et citoyens de Verdun (CACV) est un organisme sans but lucratif qui intervient dans la communauté verdunoise depuis 1975. L’organisme appuie les personnes les plus démunies afin qu’elles puissent améliorer leurs conditions de vie dans une optique de prise en charge. » Cet organisme soutient les locataires de multiples façons : cessation et résiliation de bail, harcèlement, augmentation de loyer, recherche de logement, ouverture d’un dossier à la Régie du logement, réparation et insalubrité, reprise de logement et éviction.
Sur ce même site, on retrouve d’anciennes publications telles que : Dossier spécial : la gentrification à Verdun (mars 2015) où on parle entre autres du ‘’sacrifice’’ des maisons de chambres; Lancement du registre des loyers (octobre 2015) permettant de contester le prix du loyer lors de changement de locataires; Pour une densification verte à échelle humaine (septembre 2017) où on mentionne qu’une communauté a tout à gagner quand elle est capable d’offrir un milieu de vie qui respecte l’intérêt collectif et la capacité des écosystèmes.
Promotions de logements sociaux
Le CACV participe également à la promotion et au déploiement de projets de logements sociaux, lesquels figurent parmi les solutions de justice sociale pour les personnes à faible revenu.
Par logements sociaux, on entend HLM (habitation à loyer modique), OBNL (organisme à but non lucratif d’habitation) et coopératives d’habitation. Sur son site web, le CACV, mentionne les projets de logements subventionnés auxquels il a participé (http://cacv-verdun.org/projets-en-developpement/). Mentionnons Sous le Toit de PAL où les locataires, qui ont des problèmes de santé mentale, reçoivent un soutien pour demeurer autonomes dans la communauté. « Cet organisme a prouvé, sans l’ombre d’un doute, qu’une personne confrontée à des problèmes de santé mentale qui vit dans un milieu sécuritaire, reçoit un suivi et fait partie d’une communauté compatissante, peut et pourra s’épanouir (TIRÉ DU SITE WEB : https://www.projetpal.com/fr/programmes/services-hebergement/) ».
Augmenter le nombre d’unité de logements à prix abordable est une nécessité à Verdun, car Verdun a perdu plusieurs logements locatifs qui ont été convertis en condos. Le CACV reconnaît qu’il s’agit d’un enjeu réel car, malgré les lois qui encadrent ces conversions d’immeubles locatifs en copropriétés, il existe une échappatoire qui contribue à la perte de logements locatifs.
Les projets de construction de coopératives d’habitation ont donc la cote. Par contre, la longueur du processus peut décourager des initiatives.
En effet, cela peut prendre plus de 10 ans entre le moment où se forme un groupe de citoyens et le moment où ces derniers occuperont leurs logements. Ce ne sont donc pas nécessairement les premiers signataires du projet qui occuperont les unités de logements.
Cette étape de formation d’un groupe de citoyens vise à définir certaines valeurs et priorités communes (inclusion, démocratie, écologie, etc.,) autant que le type de coopérative (ex : coopérative de solidarité où le tiers des membres sont des membres de soutiens qui n’habiteront pas la coop, comme peut l’être le CACV).
L’étape suivante est celle qui vise à mobiliser les ressources techniques, le montage financier, les architectes lorsqu’il s’agit d’une nouvelle construction et celle-ci doit respecter les normes environnementales et aménagements urbains actuels en vigueur. Un nouveau projet de coopérative d’habitation peut également se faire à partir d’un bâtiment existant.
Steve a mentionné que, de nos jours, il est difficile de rentabiliser un projet de peu d’unités en raison du prix des terrains et des programmes de financement qui ont été coupés au fil des années.
Parfois, il faut mettre de la pression sur les institutions publiques pour avoir de nouveaux logements.
En 2013-2014, le CACV a mené une campagne pour que les terrains vacants sur Gaétan Laberge soient utilisés pour la construction de logements sociaux au lieu d’être vendus par la ville au privé. Ils ont réussi à avoir une résolution favorable du conseil d’arrondissement en septembre 2014.
Le 28 mai 2018, la nouvelle suivante paraissait dans le Journal de Montréal 24h vie de quartier : Des logements sociaux dans l’arrondissement de Verdun. Dans cet article, on y mentionne la construction de logements sociaux sur les terrains municipaux du boulevard Gaétan-Laberge à Verdun. Cette annonce fait suite à une confirmation de la Ville centre qui leur réserve ces terrains pour une période de 3 ans. Le jour de la tenue du Conseil muncipal, le CACV avait mobilisé plusieurs citoyens pour mettre de la pression et faire adopter cette résolution. Il reste désormais un travail de montage financier, d’évaluation d’options et de recherche de contributions afin que la décontamination des terrains soit envisageable. La partie n’est donc pas gagnée et nécessitera beaucoup d’effort!
Activités publiques du CACV
Depuis plusieurs années, le CACV organise une série d’activités publiques qui sont annoncées sur leur page Facebook (https://www.facebook.com/cacvverdun/ Le CACV) afin d’informer, de susciter la réflexion ou de mobiliser les citoyens sur des enjeux liés à leur mission d’améliorer les conditions de vie des plus démunis.
Cette année, le CACV a organisé une série d’activités sous la thématique des coopératives d’habitation. Deux groupes fondateurs sont en train de se consolider, visant chacun à faire bâtir ou rénover un bâtiment de logement social et communautaire, pour locataires à faible et moyen revenu. Ces groupes sont toujours ouverts à intégrer d’autres membres fondateurs.
Le collectif d’art activiste (théâtre de l’opprimé, des raps, de la peinture, etc.) est une autre façon de sensibiliser la population aux revendications des locataires et de faire tomber les préjugés sur la pauvreté. Une belle découverte : Le rap du ghetto : https://www.youtube.com/watch?v=hQY6kacuVfw
Partenariat avec Demain Verdun
David et moi avons demandé quels étaient les besoins du CACV et comment la communauté pourrait se mobiliser pour y répondre. Voici ce qui en est ressorti :
- Parler d’eux, informer les locataires malpris de l’aide disponible
- Devenir membres pour échanger, amener une réflexion, participer à des activités de sensibilisation
- Mobiliser plus de gens lorsqu’il y a des besoins
- Établir des connexions pour des projets futurs ou initiatives futures
De leur côté, le CACV pourrait établir des partenariats avec Ciné-Verdun, soit pour demander de projeter des films en particulier, soit pour participer aux discussions suite aux projections.
Steve a également proposé de mettre à la disposition de Demain Verdun la salle commune du CACV qui peut accueillir une dizaine de personnes. Cela pourrait être utilisé à des fins de réunions de petits comités.
Les coopératives d’habitation : une solution environnementale et sociale
Les solutions environnementales actuelles ne sont malheureusement pas toujours accessibles à toutes les bourses (les épiceries zéro déchets, le bio), mais certaines solutions peuvent être mises de l’avant et les projets de coopératives d’habitation en font partie.
Au printemps dernier, j’ai assisté à une projection du documentaire Main basse sur la ville de Martin Frigon. Ce documentaire mentionne les dangers de confier le développement urbain entre les mains du privé seulement avec pour conséquences, entre autres, d’amener les familles à se tourner vers la banlieue, ce qui entraîne une perte des terres agricoles et des milieux naturels.
À la fin de la projection, les questions du public se résumaient à cette ultime requête : donnez-nous des solutions ! Parmi celles mentionnées par le réalisateur figurait l’engagement citoyen dans des projets de coop d’habitation. Cela donne à réfléchir…
Merci à Steve Baird pour le bel échange !