Samedi matin, je m’étais engagée à prendre part, comme simple observatrice, au Festival Éco2FEST qui se tient actuellement à Verdun (5 au 23 novembre).
Ce qui devait être une simple visite d’introduction, s’est transformé en un échange très instructif grâce à Agathe Lehel de Ouishare.
Comme nous l’avons réalisé toutes les deux, il faut vivre l’expérience de Éco2FEST pour comprendre les grands slogans qu’on retrouve sur le site web de ce festival tels que ‘’ Entrepreneurs, décideurs, et citoyens, se rassemblent pour co-construire la société de demain’’ ou ‘’ Explorons les nouvelles formes d’économies et le design durable et open-source’’.
Je lui ai d’abord demandé de définir ce que c’est l’open-source. L’open-source est un mouvement qui, si on le résume grossièrement, promeut la transparence et l’accessibilité des informations d’un projet au grand public. Ceci a pour effet, entre autres, de contrebalancer le pouvoir des grandes entreprises privées et entreprises en situation de monopole. Cette accessibilité des données permet aux petites entreprises d’innover plus rapidement et en collaboration avec leurs pairs.
Pour de nombreuses personnes, « les données sont le pétrole de demain. »
Actuellement, les grandes entreprises telles que Youtube ou GAFAM (Google, Amazone, Facebook, Apple, Microsoft) se servent des données que nous leur donnons pour, entre autres, connaître nos intérêts et orienter nos choix de consommation avec des publicités ciblées. Si le grand public pouvait avoir accès à ces données, telles que le chemin parcouru quotidiennement en utilisant google map, on pourrait cibler précisément et en temps réel des enjeux de mobilité des individus. Dans ce cas précis, cela pourrait documenter la pertinence de créer des circuits de bus qui répondraient à des besoins de mobilité et permettraient à des individus de délaisser leur voiture au profit du transport en commun.
La promotion de l’open source, c’est aussi demander aux élus de rendre accessibles leurs données. Par exemple, la Ville de Montréal a réalisé un gros travail d’ouverture de ses données et peut se vanter d’avoir conçu une plateforme de consultation des données de la Ville. C’est un premier pas vers l’outillage des citoyens dans leur réappropriation du débat public.
L’open-source amène les entreprises à transformer leurs modèles d’affaires, passant d’une économie de possession à une économie de services ou de partage (ex : système d’auto-partage comme Communauto, système de prêt d’outils ou d’instruments de musiques, etc) ce qui engendre des transformations dans de gros secteurs d’activités.
Agathe m’a cité l’exemple d’un ingénieur qui a conçu une voiture électrique. Celui-ci ne veut pas vendre des voitures mais gérer un parc de voitures. Son objectif est que la voiture dure le plus longtemps possible afin de contrer l’obsolescence programmée, tout en encourageant l’autopartage.
Éco2FEST réunit deux réseaux qui travaillent en open source : Sensorica et Ouishare.
Sensorica est un réseau ouvert et décentralisé qui utilise une plate-forme web, pour mettre en contact des ingénieurs (informatiques, mécaniques, agro-alimentaires, etc) avec des individus ou des compagnies. Par exemple, si un client souhaite développer un système d’hydroponie domestique parce qu’il pense que les gens vont vouloir avoir leur propre système d’hydroponie, ce dernier va entrer en contact avec Sensorica soit pour lui demander de fabriquer le prototype en entier, soit pour lui demander de lui procurer la pièce qui manque. Tout ce qui aura permis à Sensorica de fabriquer le prototype (le plan de réalisation) sera soit déjà disponible en open source ou Sensorica le rendra disponible sur le web. Cela permet de réduire les coûts de recherche et développement à la fois de la petite entreprise et des prochaines entreprises qui se serviront des développements réalisés pour en ajouter à nouveau.
Ouishare est également un réseau ouvert et décentralisé. Ils agissent plus sur le terrain par du conseil, de l’éducation populaire, de l’événementiel pour accompagner des porteurs de projets et des organismes dans leur développement. Les Écoles du Collaboratif par exemple illustrent leurs activités d’éducation populaire. Ce format de partage de savoirs et savoir-faire permet la diffusion d’informations grâce à des invités spécialistes de leur domaine d’activité suivie d’ateliers d’appropriation animés par l’équipe ouishare. Ils ont déjà parlé de démocratie numérique, de démocratie participative, de fabrication collaborative… et plein d’autres sujets qui nous touchent de près comme citoyens.
Dans le sous-sol de l’Église Notre-Dame-des-Sept-Douleurs où a lieu le festival, on retrouve plusieurs espaces qui répondent à divers objectifs. L’un d’eux accueille des imprimantes 3D pour réaliser des projets, l’autre offre deux divans qui permettent d’échanger un à un comme je l’ai fait avec Agathe et une partie du sous-sol est aménagé pour permettre aux participants de prendre part à des conférences. Les conférences sont dites participatives plutôt que magistrales mais elles se disent flexibles selon les besoins des participants. L’idée derrière tout ça, c’est de dire : tu es un citoyen, tu as la parole, prends-la car cet espace se veut bienveillant.
Éco2FEST de Verdun est un ‘’projet-pilote’’ qui s’inscrit dans une démarche d’instauration d’un lieu permanent pour encourager l’économie collaborative.
Il se veut un lieu de rassemblement où le citoyen, les petites entreprises, les élus, peuvent se retrouver et discuter, en donnant accès au wifi, à un projecteur, à des imprimantes 3D, mais aussi à un réseau de partenaires (chercheurs, citoyens, etc) pour développer des projets ensemble et en collaboration avec les initiatives existantes pour assurer une complémentarité des actions sur le territoire.
Jusqu’à présent, Éco2fest a abordé les thématiques suivantes :
- Mobilité
- Économie Collaborative
- Politiques publiques
- Gouvernance
- Habitation
- Agriculture urbaine
Au cours des derniers jours, il terminera avec les sujets suivants :
- Finance
- Assurance
- Industrie Manufacturière
À la fin de ce festival, des chercheurs vont réaliser une sociographie (qui sont venus, des gens plus aisés? plus instruits ? y avait-il une mixité sociale et ethnique ?) et un bilan (qu’est-ce qui a bien marché ? moins bien marché?) afin que ce projet soit réplicable et bonifié selon le territoire.
Les impacts souhaités du festival sont d’encourager l’économie locale, de faire rayonner la Ville et le territoire, mais aussi, d’avoir entre autres des retombées collatérales sur l’urbanisme et l’écologie grâce au partage du contenu des conférences et des bonnes pratiques soulevées.
Éco2FEST espère avoir une réponse favorable des élus pour un financement public d’ici mars 2019.
Merci à Agathe Lehel pour la belle discussion et bon succès à Eco2fest !