Le petit vert tendre des frondaisons printanières tarde à percer cette année.
Jour après jour je guette le moindre déploiement de bourgeons.
Il n’y a pas que le vert tendre.
Les murs sombres de l’hôpital de Verdun, juste là-bas, qui nomment la souffrance qui s’y cramponne.
Le chatoiement, dans l’eau du fleuve, de l’azur ou du gris du ciel.
Les bouleaux blancs aux troncs décharnés, avec leurs feuilles de soie délicates qui hésitent encore à se déplier.
Les trembles élancés, parés de petites grappes serrées, rouge foncé, incertaines de vouloir exploser.
La pelouse, qui n’en finit pas de temporiser, à quand le tapis d’émeraude ?
Le bassin, lui, a troqué ses eaux glauques contre une onde limpide, couleur de turquoise.
Le bouquet du feu d’artifice est pour bientôt. Les trois pommiers du Japon se préparent lentement à s’endimancher de leurs éclatantes fleurs rouges. La patience sera récompensée et le spectacle, extraordinaire.
Un rituel quotidien immuable : de légendaires couchers du soleil, flamboyants, du rouge ardent au jaune or, en passant par le mauve délicat jusqu’au bleu le plus profond. Exaltante expérience verdunoise.
Un acteur local qui prend tout cela de haut : notre grand héron argenté qui, matin et soir, passe et repasse, de son vol lourd et majestueux.
J’attends ces couleurs chaque année, avec un bonheur renouvelé. Le printemps 2020 cependant se démarque : un voile viral tamise la frénésie de l’âme, auquel la nature reste superbement indifférente.
Danielle Frank