Pour une piste cyclable protégée à l’année sur la rue Verdun !

Pour une piste cyclable protégée à l’année sur la rue Verdun !

Le hasard des rencontres

Le 1er juin dernier, j’ai participé au marathon d’écriture organisé par Demain Verdun à l’occasion de 100en1jourMTL.

Une jeune femme qui circulait de table en table s’est assise en face de moi et m’a demandé si je voulais signer sa pétition appelée Pétition pour que le projet-pilote sur la rue Verdun devienne une piste cyclable protégée à l’année.

Au moment d’écrire mes coordonnées, la jeune femme m’a regardé et m’a dit : mais tu es Emmanuelle Falaise ? Moi je suis Tania Gonzalez de l’AMAV, un projet citoyen qui s’est joint au mouvement Demain Verdun. Je travaille en mobilité et résilience urbaine au Conseil régional de l’environnement de Montréal, à la Maison du développement durable, deux étages au-dessus de Diego.

Ce matin, Tania et moi nous étions donné rendez-vous chez Chato pour parler de ce controversé projet-pilote de bande cyclable sur Verdun.

Concrètement

Concrètement, la piste cyclable se retrouve de chaque côté de la rue de Verdun, l’une, dans la rue, à côté des places de stationnement du côté nord et l’autre, collée au trottoir du côté sud.

Ces pistes sont actuellement délimitées par un simple traçage au sol (une ligne blanche) et suppriment 275 places de stationnement du côté sud durant le jour. Enfin, trois(3) à cinq (5) espaces de stationnement de courte durée sont prévus par rue transversale pour accommoder les clients.

Le Plan local de déplacements (PLD)

Ce projet s’inscrit dans la foulée de la mise en place des trois priorités du Plan local de déplacements (PLD) de Verdun, pour lequel près de 1700 citoyen-ne-s de Verdun ont été consulté-e-s, soit:

● la sécurité aux abords des écoles,

● l’amélioration du réseau cyclable,

● la cohabitation harmonieuse entre les usagers-ères.

Plus largement, il participe également à une démarche systémique de la Ville Centre visant à décarboniser et à structurer le transport actif et collectif afin que ce dernier soit plus performant, plus efficace et plus sécuritaire.

J’ai demandé à Tania d’expliquer les enjeux reliés au retrait des places de stationnement et comment l’AMAV pouvait répondre aux inquiétudes qu’ils suscitent.

Les commerçants

D’abord, on observe une résistance de la part des commerçants de la rue Verdun qui disent craindre de perdre leur clientèle. Cette résistance est compréhensible car ce sont souvent des commerçants locaux dont la marge de profit est petite. Ces derniers ont travaillé très fort pour créer des liens avec leurs clients et s’inquiètent pour leur chiffre d’affaires.

Bien que ces craintes soient légitimes, toutes les études de projets similaires réalisées dans des villes nord-américaines, montrent que des aménagements favorables aux piétons et aux cyclistes augmentent le chiffre d’affaires des commerces de proximité car, pour reprendre les mots de Tania, c’est la qualité de la relation qui distingue un petit commerçant local d’une grande chaîne, un marché Tondreau d’un Costco.

La clientèle à mobilité réduite

Plusieurs diront que les places de stationnement sont nécessaires pour accommoder la clientèle à mobilité réduite.

Par clientèle à mobilité réduite, on inclut toute personne vivant avec un handicap temporaire ou permanent qui l’empêche d’exercer ses activités quotidiennes parce que la société a failli à son devoir de favoriser l’accessibilité universelle.

Exemples de personnes à mobilité réduite :

  • Se déplacer avec une poussette,
  • Se déplacer avec une jambe dans le plâtre,
  • Se déplacer en transportant un gros colis,
  • Se déplacer avec une marchette, une canne, un déambulateur, un fauteuil roulant motorisé ou non, 
  • Se déplacer avec une perte d’équilibre, de force musculaire et d’endurance.

Depuis 2015, les aides à la mobilité (personnes qui utilisent un fauteuil -roulant de toute sorte, motorisé ou non) peuvent rouler sur les pistes cyclables. Souvent, le trottoir n’est pas assez large pour ce type de moyen de transport et les cracs des trottoirs créent des secousses sur la colonne vertébrale qui, lorsque répétées sur une longue période, peuvent causer des douleurs lombaires.

Il reste donc les personnes à mobilité réduite qui utilisent leur voiture pour faire leurs courses. Comme je l’ai mentionné précédemment, trois (3) à cinq (5) places de stationnement de courte durée seront aménagées à cette fin à chaque rue transversale de Verdun.

La complémentarité des modes de transport

La vision de l’AMAV n’est pas d’opposer le mode de transport collectif à l’automobile, mais de maximiser leur complémentarité. On peut être un piéton ou un piéton-cycliste, ou un piéton-automobiliste, ou un piéton-bus-métro et maximiser le potentiel de chacun de ces modes de transport pour diminuer la congestion routière et favoriser une meilleure qualité de vie.

Après plus de 20 ans passés à utiliser les transports en commun, je dois admettre que je comprends les citoyens qui ne sont pas prêts à renoncer à leur voiture depuis que j’ai changé de travail (je travaille maintenant à Lachine plutôt qu’au centre-ville).

J’avais déjà pensé à l’option du covoiturage mais c’est en discutant avec Tania de ma réticence à voyager avec des inconnus (je pense aux applications Netlift, Covoiturage.ca et Ouihop) qu’une idée lui est venue. Je vais entrer en contact avec des amis à elle qui se rendent tous les matins de Rosemont à Lachine, en métro-bus, et leur offrir de les récupérer au métro Verdun ! Ses amis travaillent en environnement et l’idée de pouvoir discuter de sujets qui m’intéressent pendant mon trajet quotidien de 25 min m’emballe déjà ! 

La voiture peut être au cœur de la transformation urbaine et l’infrastructure existe déjà. On a qu’à la collectiviser pour en faire une option de mobilité durable.

Tania croit aussi que les grandes institutions du quartier (réseau de la santé, établissements d’éducation, l’arrondissement) doivent participer à l’effort collectif pour la mobilité durable. Ces grandes institutions accueillent des travailleurs qui viennent souvent en automobile et n’habitent pas forcément Verdun, ce qui crée une pression sur les espaces de stationnement résidentiels et le milieu de vie. Si c’est l’employeur qui fait des efforts pour favoriser le covoiturage, payer la passe de métro ou Bixi, on maximise le degré de popularité des options de transport alternatives à la voiture solo.

Des choix de société

Lors d’un conseil d’arrondissement, une citoyenne avait exprimé son souhait que la qualité de vie des Verdunois soit privilégiée et que les enfants puissent circuler à vélo en sécurité. 

Personnellement, comme automobiliste, je trouve que le champ de vision est amélioré par la suppression de ces places de stationnement et j’ai moins peur de voir surgir un cycliste de nulle part et risquer de le frapper.

Par rapport aux stationnements sur rue, Tania mentionne qu’on confond souvent privilège avec droit et que la rue appartient à la collectivité, pas aux individus. Elle dit aussi avoir entendu beaucoup de propos haineux circuler sur les réseaux sociaux avec ce projet-pilote, comme celui qui comparait les cyclistes à de la vermine. Elle propose de ne pas répondre à ce genre de messages, mais plutôt d’en créer un autre positif.

Verdun offre une variété de services de proximité, à distance de marche et bénéficie d’une grande vitalité économique. Lorsqu’on circule à pied ou à vélo, on stimule l’économie locale, on favorise les rencontres citoyennes, au détour d’une rue, lors d’une vente trottoir ou d’un marathon d’écriture au Quai 5160, et on crée des partenariats qui donnent espoir pour la poursuite de l’action et de l’engagement citoyen en transition écologique !

Merci Tania pour cette rencontre au café des chats !

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